Résumé de thèse
Les enjeux liés à la violence extrémiste ces dernières années ont favorisé l’essor d’un bon nombre de politiques publiques dans un contexte international marqué par la prégnance des atteintes à la sécurité. Le foisonnement de nombreux programmes nationaux qui visent à encadrer la phase du post-engagement et des sorties des groupes terroristes a fait l’objet d’études récentes en Europe et au Canada. Cependant, les initiatives visant à structurer le retour des individus qui ont rejoint ces organisations sous le prisme de la criminologie et de la sociologie de l’action publique restent peu explorées dans le contexte africain, pourtant particulièrement affecté par les problématiques sécuritaires liées à l’implication dans ces groupes. Au Cameroun, notamment, une offre institutionnelle de sorties de violences extrémistes a été proposée aux ex-combattantes et ex-combattants à la suite des redditions de Boko Haram avec pour point cardinal un programme de Désarmement, de Démobilisation et de Réintégration (DDR) lancé depuis 2018 et une Stratégie de Genre (2021-2025) lancée en octobre 2022. L’objectif de la présente thèse est d’examiner spécifiquement cette fabrique de la réponse publique pour encadrer les sorties de l’extrémisme violent calquée à un contexte africain. Cette étude s’inspire de l’approche théorique de la sociologie et l’instrumentation de l’action publique tout en s’appuyant sur les travaux existants dans le domaine de la consolidation de la paix.
Combinant une analyse documentaire ainsi que des observations, cette étude se fonde sur une enquête qualitative composée de trente-sept entrevues semi-dirigées menées sur trois sites entre 2020 et 2022, au Cameroun. Les entretiens ont été conduits sur des terrains inédits auprès des professionnels chargés de la mise en œuvre du programme de Désarmement, Démobilisation et Réintégration (DDR) et les personnes prises en charge par celui-ci ainsi que des actrices et acteurs de la société civile et des organisations internationales.
Les résultats de cette recherche offrent une cartographie du déploiement de l’action publique et dévoilent un jeu d’actrices et d’acteurs ainsi que les effets de reconfigurations directs et indirects du programme de DDR. S’émancipant des débats qui minent le champ des études sur l’extrémisme violent, les analyses réalisées montrent qu’au-delà des inerties institutionnelles et des reconfigurations qu’il génère, les modalités d’appropriation nationale du programme démontrent des effets à géométrie variable. Les résultats suggèrent que la rationalité qui sous-tend l’appropriation d’un tel instrument doit subir un virage paradigmatique pour gagner en pertinence. Pour ce faire, le dispositif d’encadrement des sorties de groupes armés désignés d’organisation terroriste (GADOT) doit impérativement intégrer les actrices et acteurs de niveau intermédiaire. La présente thèse contribue in fine au développement des connaissances empiriques sur les trajectoires des personnes qui passent à travers les processus de sortie d’un GADOT, dans le cas d’espèce de Boko Haram et à la formalisation d’un modèle détaillant les composantes de la notion d’appropriation nationale autour du triptyque que sont les actrices et acteurs, les pratiques et les espaces définis.
Mots-clés: action publique, appropriation nationale, Boko Haram, DDR, extrémisme violent, instrumentation, Groupe Armé Désigné comme Organisation Terroriste (GADOT), terrorisme.
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